La douleur à vif

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Photo reportage d'Olivier Papegnies du collectif Huma, avec Justine Roche et Thomas Flamerion du service communication de MdM

Les 17èmes rencontres photographiques du festival ManifestO se tiendront du 13 au 28 septembre, place Saint-Pierre à Toulouse. Le photo-reportage que nous y exposerons cette année a été réalisé en janvier 2017 dans le village de Borek et dans le camp de Chamisku, en Irak

Les drames intimes de la seconde guerre civile irakienne se comptent par centaine de milliers 

Vernissage le vendredi 13 septembre à 20 heures
info.midi-pyrenees@medecinsdumonde.net / 05 61 63 78 78

« Être aux mains de Daesh revient à être esclave. J’ai passé mes journées seule, privée d’eau et de nourriture. Enfermée dans le noir comme en prison, je ne voyais plus le soleil. Les minutes comptaient comme des heures. J’ai été maltraitée, battue et violée par chacun de mes « propriétaires ». On n’est plus un être humain sous la menace de ce monstre de groupe armé. On vit un cauchemar éveillé. »  Haifa, 22 ans est restée deux ans prisonnières des hommes de Daesh, avant de trouver refuge dans le camp de Chamisku.

Cette histoire, ce drame intime, c’est celui qu’ont vécu des centaines de milliers de personnes au cours de la seconde guerre civile irakienne, entre décembre 2013 et décembre 2017. Occupation de leur ville, bombardements, combats et enfin la fuite pour échapper à la progression rapide de l’organisation de l’État islamique. Depuis l’annexion d’une partie de l’ouest du pays par les djihadistes de l’État islamique, les Irakiens – Kurdes, Yézidis, Assyriens ou Arabes – ont vécu dans la violence. La plupart font le douloureux récit de déplacements forcés, d’exécutions sommaires, de décapitations, de viols, de châtiments corporels et de pertes d’êtres chers. Près de la moitié d’entre eux se sont réfugiés au Kurdistan irakien et dans les régions avoisinantes. Le gouvernorat de Dohuk, située à la frontière turque, accueille début 2017 plus de 500 000 personnes qui vivent dans des préfabriqués dans des camps ou dans des abris de fortune. « Après avoir fui dans des conditions tragiques, elles sont traumatisées. La santé mentale est un des enjeux humanitaires de ce pays. Leur passé sous Daesh, leur présent de déplacés et l’incertitude de leur avenir sont des vecteurs d’importants troubles psychologiques », explique Amélie Courcaud, coordinatrice générale en Irak de Médecins du Monde. Les populations reçues par l’association souffrent d’anxiété, de troubles du sommeil, de dépression ou encore de stress post-traumatique. Les séquelles sont profondes.

voir l’intégralité des photos de l’exposition

 

Témoignage en images des blessures invisibles 

Le photographe Olivier Papegnies a accompagné les équipes de l’association pendant une semaine en janvier 2017.

Dans le camp de Chamisku, il a rencontré, Hairan, une psychologue. Aux femmes yézidies, premières victimes de la barbaries de l’État islamique, elle apprend à mieux respirer pour gérer leurs angoisses et souligne l’importance d’exprimer ce qu’elles ont vécu à un spécialiste. Car c’est notamment sous l’angle de la santé mentale que Médecins du Monde intervient toujours en Irak. Comme le dit Hairan, « Les déplacés doivent être suivis et accompagnés pour atténuer l’extrême souffrance à laquelle ils sont confrontés. Les maux de l’âme, comme ceux du corps, doivent être traités ».

À l’image, des sessions en groupe ou individuelles, l’attente d’un rendez-vous médical, la déshérence, l’ennui, la débrouille, la douleur. Et puis le difficile retour sur des terres fuies en toute hâte, imprégnés de violence et de peur. Bashra est de ces « retournés ». Lors de son retour à Borek – son village natal dans le Sinjar, occupé et attaqué par Daesh jusqu’en 2015 – les services de base, tels que l’accès à l’eau potable, ne sont plus disponibles et rares sont les échoppes qui ont rouvert leurs portes. Le silence est assourdissant, la sensation de vide étourdissante. « Je suis heureuse d’avoir retrouvé ma maison mais tout a changé ici, c’est un village fantôme et ceux qui sont rentrés ont encore peur de l’EI. Rien ne sera comme avant désormais », raconte-t-elle.

C’est cette indicible angoisse du déplacement forcé et de la liberté retrouvée, l’horreur qui s’imprime dans les esprits que révèle ce photo reportage.

 

 

 

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