(c) Jérôme Sessini / Magnum Photos pour MDM
Le public reçu dans les programmes de Médecins du Monde est constitué de patients en grande précarité, souvent sans logement, pour qui le manque de repères et de stabilité n’est qu’un frein supplémentaire à l’insertion et à la prise en compte de leur santé. Parmi les patients étrangers, beaucoup ont fui un pays dans lequel ils étaient persécutés, ont des histoires de vie complexes et des parcours difficiles. Aux traumatismes subis dans leur pays viennent s’ajouter le contexte migratoire, la précarité administrative, les pressions policières, les incertitudes liées à l’avenir.
En 2013, au sein des Caso, des troubles d’ordre psychologique ont été repérés pour près de 11 % des consultants, plaçant ces troubles au 5e rang des problèmes de santé diagnostiqués parmi les patients. Force est de constater qu’il est probable que ce chiffre soit sous-évalué, dans la mesure où les troubles d’ordre psychosomatique ne sont pas toujours évidents à évaluer lors d’une consultation de routine et d’un premier contact avec un patient dont ce ne sera que très rarement la plainte et le motif de consultation. Les troubles psychiques constituent pourtant la pathologie la plus fréquente chez les exilés, particulièrement les demandeurs d’asile et les réfugiés. En 2013, 3582 consultations avec psychologues ou psychiatres ont été enregistrées sur l’ensemble des Caso, 27 % des patients reçus en consultation psy avaient déposé une demande d’asile (déboutés, demande en cours, recours, réfugié…).
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Or face à un dispositif public saturé, souvent peu disposé à les écouter et surtout inadapté (pénurie de soignants et d’interprètes, difficultés des soignants à s’adapter à une clinique particulière, question de la domiciliation des patients…) les personnes précaires rencontrent de nombreux obstacles dans l’accès aux soins de santé mentale. La connaissance du contexte institutionnel de la psychiatrie et de la santé mentale ainsi que la prise en compte de leurs conditions de vie sont essentielles à la qualité des actions de prévention et de soins.
Nous devons rester vigilants quant aux différentes formes et à la qualité de nos prises en charge, ouvertes et adaptées à la situation de chaque patient, tout en évitant de s’inscrire dans un processus de continuité qui doit rester du ressort des structures de soin institutionnelles. Il faut également veiller aux spécificités de diagnostic et de prise en charge des psycho-trauma. Un groupe de travail paritaire constitué en 2011 a défini des pistes de réflexion transversales à l’ensemble des Caso et des programmes MdM. Ces recommandations rejoignent les propositions élaborées lors de l’atelier « Santé mentale » qui s’est tenu lors des Journées des missions France à Sète en septembre 2013.
Ces pistes de réflexion concernent l’accueil des patients, l’identification des troubles psychiques, les questions liées à l’interprétariat pour les patients non-francophones, la mise en œuvre des traitements, la nécessaire pluridisciplinarité, l’analyse de nos pratiques, les possibilités de coordination avec les structures de droit commun et le plaidoyer.