Guzam Shaphatava (Batura), travailleur social pair, ex-usager
Photo de Olivier Papegnies
Depuis quand travaillez-vous à New Vector en partenariat avec MdM ?
Je travaille à New Vector depuis 2006 en tant que travailleur social.
En quoi consiste votre travail ?
Je travaille directement avec les usagers qui viennent au Drop-In-Center. Quand ils viennent, je les informe sur les maladies, les risques de transmission mais surtout j’étudie leurs besoins. En fonction de ce qu’ils me disent, je leur donne du matériel stérile ou je leur donne la possibilité de faire un fibroscan, d’avoir accès aux services de dépistage (syphilis, tuberculose…) ou encore de bénéficier de consultations dentaires. Parallèlement, je les accompagne vers les différents services médicaux (programmes de substitution/ méthadone, centre de tuberculose, centres de désintoxication), sociaux et les informe sur leurs droits.
Je mène ces activités au DIC mais aussi en outreach – à l’extérieur- pour aller vers les usagers qui ne viennent pas au centre ou qui ne le connaissent pas.
Pour savoir accompagner au mieux les usagers, j’ai suivi plusieurs formations proposées par MdM et le Fond Mondial sur les MST, les risques d’infections, les bonnes pratiques pour éviter les contaminations. Bientôt, je pourrai moi-même former les usagers.
Quels sont les avantages à être travailleur pair ?
Les usagers me connaissent, ils me font confiance et m’écoutent. Je suis un ancien usager et ils savent que je les comprends, que je suis passé par les problèmes auxquels ils sont confrontés. Je sais ce que c’est de ne pas avoir de travail, je connais les difficultés d’accès aux programme de substitution et de méthadone par exemple. Ils se livrent facilement et me disent de quoi ils ont besoin.
L’essentiel dans ce travail est l’écoute, de travailler avec le bénéficiaire, de décider de ce qui est le mieux pour lui ensemble. On ne le juge pas, on est dans un rapport d’égal à égal.
Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?
J’ai commencé à fumer de la marijuana à 16 ans. A 19 ans, j’ai commencé à m’injecter du subutex et de l’héroïne. J’ai résisté pendant longtemps, à l’époque tous mes amis en prenaient. Les drogues étaient très faciles d’accès, j’ai finalement cédé et je suis tombé dedans.
Je me suis injecté pendant trois ans même si j’ai essayé d’arrêter à plusieurs reprises. Tout a changé quand je suis devenu bénévole et surtout quand j’ai commencé à travailler au sein de New Vector car j’ai eu des responsabilités et un salaire. Je me devais d’être en forme dans mon travail, j’ai pris conscience que les usagers comptaient sur moi. J’étais utile pour les autres. Pour bien informer les usagers, bien faire mon travail et ne pas prendre le risque d’aller en prison, j’ai eu la force d’arrêter. Mon travail m’a fait grandir, m’a sauvé en quelques sortes.
Que pensez-vous du programme de traitement lancé par la Géorgie ?
C’est une chance inouïe que nous avons et je tiens à remercier le gouvernement pour cela. Ils nous donnent l’occasion d’en terminer avec l’Hépatite C.
C’est un progrès incroyable mais des problématiques restent non résolues. Dans un premier temps, ils doivent améliorer la communication sur le programme national, sur qui y a accès car beaucoup d’usagers n’en ont pas entendu parler.
Le gouvernement doit également prendre en charge toutes les étapes/frais liés au traitement. En effet, les usagers ont des frais annexes au traitement comme ceux liés aux effets secondaires ou au monitoring (test de charge virale devant être fait quatre fois pendant le traitement). Si ces frais ne sont pas pris en charge, les usagers ne pourront pas poursuivre le traitement car ils n’ont généralement pas d’argent et ne pourront pas guérir.
Enfin, ce plan national d’éradication ne pourra pas fonctionner s’il n’y a pas la promotion des services de RdR. Sans cela, le plan sera un échec. Il faut bien sûr mettre à disposition le traitement mais également faire de l’éducation à la santé : les bénéficiaires doivent être accompagnés, encadrés pour éviter les cas de réinfection et leur permettre d’appliquer les bonnes pratiques pour empêcher la transmission du virus.
Sans la RdR, le gouvernement ne viendra jamais à bout de l’Hépatite C. Si le plan échoue, je serai extrêmement déçu car je fais tout mon possible pour qu’on vienne à bout de l’Hépatite C.