Madagascar – (c) Mylène Zizzo 2014
L’Opération Sourire (OS) de Médecins du Monde a célébré ses 25 ans au cours d’une soirée très festive qui s’est déroulée le 12 décembre 2014 à Paris au « Laboratoire ». Cet événement réunissait les équipes de l’OS, de nombreux acteurs de MdM France, dont son président Thierry Brigaud, des membres du réseau international de MdM et des représentants du sponsor de l’OS, la Fondation L’Oréal.
Histoire et objectifs de l’Opération Sourire
L’OS est un programme de chirurgie réparatrice de MdM qui a été créé en 1989 par un chirurgien plasticien, le Dr François Foussadier, dans l’objectif de redonner le sourire à des personnes, et plus particulièrement à des enfants atteints de pathologies congénitales ou acquises. Il permet la prise en charge chirurgicale de pathologies cranio-faciales et de séquelles de brûlures. Ce programme s’inscrit dans une logique de solidarité dans les pays en développement, vis-à-vis des personnes les plus défavorisées qui ont une altération de leur apparence.
L’OS intervient en partenariat avec les acteurs locaux pour le suivi et la prise en charge post-opératoires qui sont souvent complexes et pour permettre la réinsertion psycho-sociale d’opérés souvent mis préalablement au banc de leur communauté : enfants avec des becs de lièvre, femmes victimes de brûlures à l’acide etc.
Depuis sa première mission en 1989 à l’hôpital de Battambang au Cambodge, l’OS intervient en Afrique et en Asie où elle collabore étroitement avec des partenaires locaux pour transférer des compétences « du Nord vers le Sud » dans l’objectif d’aboutir à du développement « Sud-Sud » après formation de formateurs.
Au cours de ces 25 années, des équipes de l’OS ont également pris en charge des pathologies spécifiques liées à certains contextes et jusqu’alors peu opérées.
C’est le cas du Noma au Niger sous l’impulsion du Pr Jean-Marie SERVANT. Cette maladie qui sévit principalement en Afrique de l’ouest, atteint surtout des enfants en bas âge qui vivent dans des conditions d’extrême pauvreté. Il s’agit d’une gangrène qui mutile atrocement la face, favorisée par le manque d’hygiène, la malnutrition et les maladies infectieuses.
D’autres pathologies plus rares ont été également prises en charge par l’OS, notamment les méningo-encéphalocèles dont s’occupe le Pr Frederik Lauwers au Cambodge : c’est une déhiscence de la boite crânienne responsable d’une extériorisation du tissu cérébral et des méninges.
Le bilan de l’OS de MdM en quelques chiffres
Entre 1989 et 2013, plus de 13 000 personnes ont été opérées dans le cadre de l’OS.
Il s’agit principalement de becs de lièvre (25%), de séquelles de brûlures (25%) et de tumeurs (14%) qui ont été opérés par des équipes appartenant à quatre délégations du réseau international de MdM : France, Pays-Bas, Allemagne et Japon, qui seront peut-être bientôt rejointes par les anglais.
L’OS en 2013, ce sont : 22 missions dans 10 pays, 1075 opérés, 116 acteurs bénévoles, un budget de 590.000€.
Le partenariat avec la Fondation L’Oréal
Consciente du rôle fondamental que joue l’apparence dans les mécanismes de construction de l’identité de chacun, de l’estime de soi et de la dignité, la Fondation L’Oréal s’engage à lutter contre l’exclusion des personnes dont le corps meurtri demeure un facteur de marginalisation. En effet, la malformation physique ou l’altération de l’apparence, quelle qu’en soit la cause, conduisent souvent à l’exclusion. Au-delà de la réparation physique, l’opération chirurgicale représente pour les patients un espoir de retour à une vie normale grâce à leur réintégration dans leur communauté et dans leur cercle familial. Ils peuvent à nouveau aller à l’école, travailler et fonder une famille.
Depuis 2008, la Fondation L’Oréal soutient l’OS dont elle est le partenaire exclusif. Grâce à ce partenariat, près de cent missions ont été effectuées et près de 4000 patients ont été opérés par les équipes de MdM. Ce soutien permet également le déploiement à l’international de l’OS et l’élargissement aux autres associations membres du réseau de MdM.
Le bilan de l’OS est très positif
Les équipes chirurgicales possèdent une grande expertise, condition sine qua non à des soins spécialisés de qualité.
Le déroulement des missions sur le lieu de vie des patients a deux avantages; réduire leurs contraintes financières avec pour corollaire une meilleure accessibilité aux soins et faciliter leur réinsertion sociale.
Les partenariats et les missions, en s’inscrivant dans la durée, permettent une amélioration progressive de la qualité de la prise en charge pré, per et post-opératoire des patients.
L’OS suscite une forte mobilisation associative avec plus de cent bénévoles par an sur le terrain.
Un partenariat financier exclusif depuis 2008 avec la Fondation L’Oréal permet une meilleure structuration des missions grâce à une couverture financière stable.
Un élargissement progressif au réseau international de MdM donne d’autant plus de visibilité à nos actions vis à vis de nos donateurs.
Cette expertise de 25 ans en chirurgie humanitaire est partagée au cours d’une journée annuelle de rencontre avec les délégations du réseau international de MDM.
Après 25 ans d’existence, l’OS doit faire face à de nouveaux enjeux stratégiques
Dans l’objectif pour MdM d’améliorer sans cesse la qualité de ses programmes, le financement actuel par L’Oréal sans mobilisation de fonds propres ne permettra pas de renforcer significativement le parcours de soins, la réhabilitation physico-psycho-sociale et une recherche clinique qui relève des domaines d’expertise de l’OS (Fentes labio-palatines, Noma, Brûlures)
Les programmes de l’OS n’ont de sens que pérennes, en s’adossant à la formation d’équipes chirurgicales nationales pour faire face à la pénurie de personnels soignants dans les P.E.D. Ces formations doivent être à la fois pratiques par « compagnonnage » et théoriques en partenariat avec les Universités. Le caractère ponctuel des missions est le principal facteur limitant de cette stratégie.
Enfin, le développement de l’OS nécessite d’accroître sa visibilité à la fois pour MdM et pour L’Oréal, dans le cadre d’un partenariat «gagnant-gagnant»…
– Qui passe par un renforcement de la communication sur ce que l’on fait: pour qui, comment, pourquoi et avec quels résultats ?
– Qui s’appuie sur des axes forts de plaidoyer, par exemple les femmes brûlées à l’acide, les enfants victimes du Noma.
Dès lors, se pose à moyen terme la question du modèle opérationnel et financier que MdM souhaite développer pour l’OS :
Quel modèle opérationnel ?
Soit plus de missions sur un mode classique de courte durée et limité en termes d’activité, soit moins de mission, mais de plus gros volume et plus longues, qui nécessitent plus de ressources humaines, qui sont plus visibles, mais qui coûtent donc plus cher selon le modèle que MdM Pays-Bas développe depuis 2011.
Quel modèle financier ?
Continuer sur le mode de financement actuel, annuel et exclusif, de 400.000 € que la Fondation L’Oréal souhaite poursuivre et qui nécessite la mobilisation de fonds propres de MdM ou convaincre cette Fondation du bienfondé d’un partenariat pluriannuel et/ou d’une diversification de nos financements.
Je souhaitais partager cet émouvant témoignage du Dr Philippe Micheau, chirurgien « historique » de l’OS :