Médecins du Monde a lancé en juin 2019 un programme inédit en Birmanie, pour garantir l’accès au traitement de l’hépatite C aux personnes les plus vulnérables. Objectif : démontrer la possible élimination du virus grâce à la combinaison d’un accès au traitement et de services de prévention adaptés.
La Journée mondiale contre l’hépatite (le 28 juillet dernier) était l’occasion d’intensifier les efforts internationaux de lutte contre cette maladie, d’encourager l’engagement des individus, mais aussi de souligner « le besoin d’une riposte mondiale plus énergique », explique l’OMS sur son site internet.
Médecins du Monde (MdM) en a donc profité pour rappeler qu’elle offrait un accès au traitement de l’hépatite C dans l’État du Kachin en Birmanie. Dans ce pays, 1,4 million de personnes seraient infectées par le virus de l’hépatite C (VHC). Le gouvernement birman estime également entre 80 et 90 000 le nombre de personnes injectrices qui sont particulièrement exposées aux risques d’infections.
À titre d’exemple, dans l’État du Kachin, où MdM mène un programme communautaire de réduction des risques et des dommages liés à la consommation de drogues, 30 % des personnes reçues dans les cliniques sont infectées par le virus de l’hépatite C, tandis que 17 % d’entre elles sont co-infectées VIH-Hépatite C, précise le communiqué de MdM.
En partenariat avec Médecins sans frontières-Suisse, l’ONG a donc lancé depuis juin 2019, un programme inédit pour garantir l’accès au traitement de l’hépatite C aux personnes les plus vulnérables. Objectif : soigner 1 400 Birmans et « démontrer la possible élimination du virus de l’hépatite C grâce à la combinaison d’un accès au traitement et de services de prévention adaptés ».
Opportunité unique d’éliminer l’épidémie d’hépatite C
Selon l’ONG, les nouveaux traitements antirétroviraux à action directe (AAD) offrent une opportunité unique d’éliminer l’épidémie d’hépatite C. En effet, ils « permettent d’éliminer le virus en 8 à 12 semaines et de diminuer considérablement les infections. Le développement de versions génériques a permis de réduire le coût des traitements à moins de 100 euros par patient. »
Mais la communauté internationale peine à s’en saisir. Le nombre total de patients traités avec les AAD est certes passé d’environ 1 million à 1,5 million entre 2015 et 2016, mais « la vaste majorité (4/5e) des personnes vivant avec le VHC dans le monde ne sont toujours pas diagnostiquées », regrette MdM qui rappelle que 71 millions de personnes dans le monde sont infectées par le VHC.
Par ailleurs, une nouvelle infection sur cinq serait liée au partage de matériel pour la consommation de drogues, « en raison du manque d’accès à des outils de prévention (programmes de distribution de seringues, traitements de substitution aux opiacés, etc.) ayant pourtant prouvé leur efficacité », ajoute MDM.
Des barrières freinent l’accès aux soins
De plus, de nombreuses barrières freinent l’accès aux soins : prix des tests diagnostiques, restrictions légales empêchant l’accès à des médicaments génériques à prix abordable, stigmatisation et discrimination des usagers de drogues qui ne peuvent donc rentrer dans les critères d’accès aux traitements….
Pour en revenir au programme de MDM sur l’accès au traitement de l’hépatite C en Birmanie, l’ONG constate que les personnes infectées par le VHC ont des difficultés importantes pour accéder au dépistage, au diagnostic et au traitement.
Malgré le lancement d’un programme national contre l’hépatite en juillet 2018, le traitement est toujours onéreux (environ 300 $ pour trois mois de traitement) et peu accessible. Si l’on s’en tient à l’État du Kachin, seuls 300 patients en auraient bénéficié à l’hôpital de Myitkyina en 2018, contre 200 à l’hôpital de Mohnyin. En raison des barrières qui freinent l’accès aux soins, de nombreuses personnes injectrices infectées par le VIH et le VHC continuent à mourir en raison de complications de maladies du foie, estime MdM.
Adaptation aux usagers de drogues
L’objectif principal du programme est donc de réduire la morbidité et la mortalité chez les personnes injectrices vivant avec le VIH et le VHC. Comment ? En simplifiant la mise en place des stratégies de prévention, de diagnostic et de traitement, tout en les adaptant aux usagers de drogues.
Au total, 1 400 personnes actuellement sous antirétroviraux seront traités durant deux ans. En 2019, 600 patients atteints d’hépatite C au stade avancé seront traités. La deuxième phase du traitement, qui se déroulera en 2020, concernera 800 patients qui ne sont pas au même stade de la maladie.
En 2016, la communauté internationale s’était engagée à guérir 80 % des personnes vivant avec l’hépatite C d’ici 2030. Pour atteindre ces objectifs ambitieux, « les États doivent éliminer les barrières qui écartent les personnes usagères de drogues des services de prévention et de traitement. Il est urgent d’adopter une approche fondée sur la promotion de la santé et le respect des droits humains », conclut MdM.