Pour élargir le champ du partage d’expériences à MdM, quelques cinéphiles (voire plutôt cinévores) ont souhaité partager leurs débats, coups de cœur et coups de gueules cinématographiques. L’antenne est ouverte à tous, partout dans le monde, pour cette rubrique que l’on espère mensuelle !
Les films à voir
Le débat
Laurent Bacos, Marie Lussier et Niklas Luhmann lancent un débat autour du film Dheepan de Jacques Audiard, Palme d’Or au Festival de Cannes et actuellement à l’affiche. ATTENTION : La chronique de Niklas révèle la fin du film ! |
∗∗∗
|
∗ Une palme d’Or “curieuse”? Non, une palme d’or scandaleuse. Une palme d’or qui encense une vision cousue de clichés. Audiard revendique une utilisation neutre de la banlieue comme décor, pour son esthétisme, il aurait tout aussi bien pu tourner dans un champs de coquelicots. Mais non, pas de coquelicot, il fait le choix du réalisme, et pourtant son sujet est détaché de toute réalité. Ce n’est pourtant pas sujet neutre, c’est éminemment politique, ce dont est totalement dépourvu le film. Delorme a trouvé la formule: “Dheepan est le parfait résultat, conscient ou non, de la « BFMisation » des cerveaux”. Guets sur les toits, guerre de gangs, absence de police tout y est dans cette no-go-zone factice et fantasmée. Une “histoire d’amour” déclare Audiard? Elle aussi, factice et impalpable. Seule la relation entre et Yalini et Brahim (Vincent Rottiers, comme toujours remarquable) offre un semblant d’émotion et profondeur. Audiard fait des films à palme, il a réussi en proposant une vision sexiste, animale et fataliste d’un homme enfermé dans son passé, ses instincts, tigre un jour, tigre toujours.
|
∗∗ Tout ça commence bien. Audiard déploie un sujet formidable avec une photographie magnifique et un super casting. On dirait presque que c’est plus fin et complexe que dans ‘Un prophète’. Jusqu’au moment ou ça tourne dans un film de genre bête et idiot. Et à la fin, le mec tire sur tout et la femme lui sauve la vie. Mais les frères Cohen ont-ils fumé la moquette? Non ce n’est pas un bon film sur l’amour, ni un bon film sur le trauma, ni un bon film sur la migration et surtout pas un bon film sur la banlieue. C’est un film efficace – ‘entertainement’ sans poésie. Il n’y a rien de magique, rien de surprenant. Et, en plus, quelque chose de dangereux en montrant la banlieue française toujours et toujours de cette façon totalement simpliste.
|