Je suis médecin de famille installé à Illkirch-Graffenstaden depuis 1984 et professeur de médecine générale à la faculté de Strasbourg depuis 1998.
Lors de mes fonctions de Délégué régional, l’actualité la plus marquante a été la pandémie de Sida.
Il me semble important ici de rappeler quelques dates.
- Début des années 80 : apparition d’une nouvelle maladie, totalement inconnue jusque-là. Au début, elle ne semble toucher que quelques communautés et on parle des 3 H : homosexuels, hémophiles et haïtiens
- 1983 : mise en évidence du virus du sida par l’équipe française menée par Luc Montagnier
- 1984 : premiers tests de dépistage
- 1986 : MdM ouvre le premier CDAG (centre de dépistage anonyme et gratuit) à Paris. Les premières évaluations sont totalement surprenantes pour l’époque : vingt pour cent des personnes testées positives sont toxicomanes. On rajoute alors un 4ème H = héroïnomanes.
A partir de ce constat, émerge la politique dite de réduction des risques : il ne s’agit plus d’empêcher à tout prix que les toxicomanes se shootent, il faut leur apporter les moyens de le faire à moindre risque.
- 1987 : Michèle Barzach (ministre de la santé) impose la vente libre des seringues en pharmacie
- 1988 : généralisation des CDAG sur tout le territoire national
- 1989 : MdM ouvre le premier bus d’échange de seringue à Paris
- MdM Alsace décide de suivre. Nous obtenons un soutien majeur de la Ville de Strasbourg avec Catherine Trautmann (maire) et Marie-Hélène Gillig (adjointe aux affaires sociales). L’Etat s’engage également à l’aide de fond dédié à la prévention du sida
- Fin 1992 : embauche de Danièle Ledit, coordinatrice de la Mission Sida Toxicomanie de MdM Alsace. L’objectif est d’ouvrir un bus d’échange de seringue à Strasbourg. Ralliement et formation de nombreux bénévoles
- Début du travail sur le terrain (Place Blanche, dans le quartier gare) début 1993 et inauguration officielle du bus en avril 1993 avec la participation du président de MdM, Gilles Brucker
Petit à petit, les intervenants de la Mission Sida Toxicomanie se rendent compte que la galère quotidienne des personnes rencontrées pour se fournir en héroïne empêche toute resocialisation. L’idée de pouvoir proposer un médicament de substitution progresse et nous ouvrons un Centre Méthadone début décembre 1994.
Les donateurs de MdM font alors savoir qu’ils s’interrogent sur cette action. La lutte contre la toxicomanie relève d’une compétence d’état et non d’une ONG. La direction de MdM entame alors des négociations pour passer la relève de la Mission Sida Toxicomanie. L’Etat, la ville de Strasbourg et MdM trouvent un accord pour la création d’une nouvelle association : Espace Indépendance, sous l’égide de Médecins du Monde.
Je deviens alors le président de cette nouvelle structure et je passe la main à Pierre Rosenstiel pour la Délégation Alsace.