Nous tenons à vous partager ici quelques-uns des hommages collectifs qui ont été rendus le vendredi 17 novembre – au siège de MdM, et partout ailleurs – en mémoire de nos collègues disparus, Maysara Rayyes et Alem Mulugeta Getahun, et du courage de leur engagement sans faille.
Nous exprimons, à nouveau ici, toutes nos condoléances et notre soutien à leurs proches et aux équipes. Merci par ailleurs pour votre présence et pour votre engagement. Que l’on soit ici ou là-bas, que l’on soit bénévole ou salarié.e, quelle que soit notre nationalité, nous ne faisons qu’un.e : nous sommes toutes et tous des Médecins du Monde.
Solidairement,
Florence Rigal et Joël Weiler
Présidente et Directeur Général de MdM France
We would like to share with you some of the tributes that were paid on Friday 17 November 2023 – at MdM’s headquarters and everywhere else – in memory of the colleagues we lost, Maysara Rayyes and Alem Mulugeta Getahun, and of their courage and their unwavering commitment.
Once again, we would like to express our condolences and our support to their loved ones and the teams. Besides, thank you for being present and committed.
In France or abroad, whether you are a volunteer or an employee, no matter your nationality, we are all one: we are all Médecins du Monde.
In solidarity,
Florence Rigal and Joël Weiler
President and Executive Director MdM France
Alem avait 37 ans et était Ethiopienne
Maysara avait 28 ans et était Palestinien
L’hommage au siège de MdM France – Discours de Florence Rigal, Présidente
Merci pour votre présence nombreuse. Ici à Paris au siège, en Palestine, au Nigéria et partout ailleurs.
Il nous faut vivre avec nos morts. Médecins du Monde doit vivre avec ses morts. Nous n’avons pas le choix.
La mort d’une ou d’un collègue est une catastrophe. La mort d’un travailleur humanitaire ne devrait pas exister. Pas plus que la mort de civils sous les bombes.
Le 17 novembre 2022, nous sommes nombreux à nous souvenir de ce que nous faisions. Et d’où nous étions quand nous avons été informés de l’assassinat d’Alem Mulugeta Getahun dans la localité de Damboa, au nord-est du Nigéria.
Sa famille et ses proches sont les plus affectés. Mais nous, ses collègues, avons aussi été profondément atteints.
Médecins du Monde a assumé ses responsabilités. Je tiens à remercier toutes les personnes qui, dans la maison, ont été impliquées dans la gestion de ce drame. Mais aussi dans le soutien et l’accompagnement de la famille.
C’est toujours un événement difficile, où l’on ne peut qu’accepter, écouter et entendre. L’humain. La peine. Les considérations matérielles.
Sa famille et ses proches vivent leur deuil, cela leur appartient. Voici un court extrait du message qu’ils nous ont adressé à la veille de cette commémoration : « Les adieux les plus difficiles sont ceux que vous ne pouvez faire qu’après qu’une personne ait cessé de respirer, quand vous êtes confrontés à son corps sans vie et que les mots vous manquent parce que rien ne vous préparait à ce genre d’expérience. Ce jour-là, nous pourrons enfin parler du voyage d’Alem ainsi que du nôtre. Cette année n’a pas été facile à gérer en son absence ; chaque jour est différent, et nous attendons toujours son appel même si la réalité est toute autre. » Lire l’intégralité du message de la famille d’Alem
Chaque acteur et actrice de Médecins du Monde vit aussi son deuil, à sa façon. Et notre deuil est empreint de colère et de révolte.
Alors que nous nous préparions à commémorer ce difficile 1er anniversaire de la perte d’Alem, notre communauté est à nouveau dévastée et endeuillée par l’assassinat d’un collègue, en Palestine cette fois-ci. En effet, le 8 novembre 2023, c’est avec tristesse et douleur que nous avons annoncé le décès de notre collègue Maysara Rayyes, tué avec sa famille lors du bombardement de son immeuble à Gaza.
Face à la dureté des événements actuels pour nos équipes, leurs proches et les populations civiles, ce temps de pause pour un hommage collectif est indispensable. Nous en avons besoin pour continuer à avancer.
Maysara et Alem représentent deux parcours et destins séparés, et malheureusement liés. Ce sont 2 tragédies de trop, que nous n’oublierons jamais. 2 assassinats de trop, à jamais impardonnables. Au-delà de de leur mémoire, que nous ne cesserons jamais d’honorer, c’est la force et le courage de leur engagement sans faille que nous tenons à saluer aujourd’hui. Car la perte de nos collègues est bien une perte pour l’humanité.
Alem avait 37 ans et était Ethiopienne
Mariée et mère d’un petit garçon, sa compassion, son empathie et sa générosité faisaient d’elle une personnes appréciée de tout le monde. Coordinatrice des ressources humaines pour Médecins du Monde, elle a été assassinée par un militaire nigérian alors qu’elle travaillait pour apporter de l’aide vitale aux populations dans le nord-est du pays.
Sur place, nous cherchons toujours à obtenir des réponses à nos questions auprès des autorités nigérianes.
Maysara, lui, avait 28 ans et était Palestinien
Il était marié, avait une famille, des amis, des collègues. Il y a 2 ans, après ses études, il avait fait le choix de rentrer de Londres pour apporter une assistance médicale vitale à la population exsangue de la bande de Gaza. Ceux qui ont rencontré Maysara se rappellent de son dévouement, de son intelligence et de sa bonté. Médecins urgentiste et superviseur médical pour Médecins du Monde, il a été assassiné, ainsi que plusieurs membres de sa famille, lors d’un lâche bombardement de son immeuble par l’armée israélienne dans la ville de Gaza.
Aujourd’hui, notre tristesse est infinie et l’emporte sur tout. L’injustice de leurs morts ne fait que renforcer nos convictions en matière d’humanisme, de solidarité. Il est évident que le 17 novembre 2022 et le 8 novembre 2023 resteront, pour nous toutes et tous, des cicatrices indélébiles avec lesquelles nous devons vivre le reste de nos vies. Et avec lesquelles nous continuerons de travailler.
Face au déferlement sans précédent de violence depuis plus d’un mois en Palestine, et particulièrement dans la bande de Gaza, notre inquiétude demeure très vive quant à la vie et à la santé de tous nos collègues sur place. Dont certains travaillent d’ailleurs dans des hôpitaux. Leur sécurité, et celle de toutes nos équipes dans le monde, demeurera toujours notre priorité majeure. Aussi nous répétons sans relâche notre appel à un cessez-le-feu et au déploiement de l’aide humanitaire.
Un autre mot se doit aussi d’être prononcé aujourd’hui, et ce mot c’est celui de la « colère ». Elle aussi est infinie. Nous dénonçons de la façon la plus ferme possible ces attaques inhumaines et intolérables. Ces drames nous engagent encore plus dans notre plaidoyer pour le respect du Droit International Humanitaire et la protection des civils.
Aujourd’hui, nous sommes blessés et meurtris pas ces pertes. On peut se sentir impuissant. Pour autant, face à l’adversité et à la brutalité des forces qui nous entourent, nos convictions sont intactes, tout comme notre détermination à poursuivre la lutte pour la justice et pour l’humanité.
En la mémoire de nos collègues, nous ne cesserons jamais ni d’intervenir auprès des personnes vivant dans des situations de crise, ni de nous battre pour l’accès aux droits et aux soins, ici et là-bas.
Nous le devons à Maysara.
Nous le devons à Alem.
Pour conclure, nous exprimons, à nouveau ici, toutes nos condoléances et notre soutien à leurs proches et aux équipes. Nous remercions également nos collègues qui accompagnent les proches des disparu.e.s. Ainsi qu’aux très nombreuses personnes qui ont adressé leurs messages de soutien, qui seront remis aux équipes et aux proches.
Salut à toi Maysara.
Salut à toi Alem.
En la mémoire de nos deux collègues et de leur engagement, nous vous invitons maintenant à observer une minute de silence.
[…]Merci pour votre présence et pour votre soutien.
Alem was 37 years old and Ethiopian
Maysara was 28 years old and Palestinian
MdM France tribute at headquarters – President Florence Rigal’s speech
Thank you for coming in such large numbers. Here, at the headquarters in Paris, in Palestine, in Nigeria, and everywhere else.
We have to live with our dead. Médecins du Monde has to live with its dead. We have no choice.
The death of a colleague is a catastrophe. The death of a humanitarian worker should not happen. Nor should the deaths of civilians under the bombs.
Many of us will remember what we were doing on 17 November 2022. Where we were when we were informed of the murder of Alem Mulugeta Getahun, in the town of Damboa, in north-east Nigeria.
Her family and friends are the worst affected. But we, her colleagues, were also deeply affected.
Médecins du Monde has shouldered its responsibilities. I would like to thank everyone in the organisation who has been involved in dealing with this tragedy. But also in supporting and accompanying the family.
It is still a difficult event. All we can do is accept, listen and hear. Humanity. Pain. Material considerations.
Her family and friends are grieving. Their grief belongs to them. Here is a short extract from the message they sent us yesterday, on the eve of this commemoration: “The hardest goodbye is the one where you don’t get to declare it until they are no longer breathing, the one where you face to face with their lifelessness and you don’t have the word to express it because this kind of goodbye wasn’t expected. On this day, we will finally be able to speak about Alem’s journey as well as our own. This year was not easy to deal with her absence; every day is not the same, and we always expect her call even though the reality was opposite.” Read the full message from Alem’s family
Everyone who works at Médecins du Monde is also grieving in their own way. And our grief is tinged with anger and indignation.
As we prepare to commemorate this difficult first anniversary, our community has once again been devastated and bereaved by the murder of a colleague, this time in Palestine. On 8 November 2023, it was with sadness and pain that we announced the death of our colleague, Maysara Rayyes, who was killed with his family when his building in Gaza was bombed.
Given the severity of the current events for our teams, their families and the civilian population, it was essential for us to pause and pay collective homage. We need this if we are to keep moving forward.
The paths and destinies of Maysara and Alem were separate, but sadly linked. Their deaths are two tragedies too many. Two tragedies that we will never forget. Two murders too many. Forever unforgivable. Beyond their memory, which we will never cease to honour, it is the strength and courage of their unfailing commitment that we wish to salute today. Because the loss of our colleagues is a loss for humanity.
Alem was 37 years old and Ethiopian
Married with a young son, her compassion, empathy and generosity made her much-loved by all who knew her. A human resources coordinator for Médecins du Monde, she was murdered by a Nigerian soldier while working to bring vital aid to people in the north-east of the country. We are still seeking answers to our questions from the Nigerian authorities.
Maysara, him, was 28 years old and Palestinian
He was married, had a family, friends and colleagues. Two years ago, after completing his studies in London, he decided to return to Palestine to provide vital medical assistance to the depleted population of the Gaza Strip. Those who met Maysara remember his dedication, his intelligence and his kindness. An emergency doctor and medical supervisor for Médecins du Monde, he was murdered, along with several members of his family, in a cowardly bombardment of his building in the city of Gaza by the Israeli army.
Today, our sadness is infinite and outweighs everything else. The injustice of their deaths only strengthens our convictions about humanism and solidarity. It is clear that 17 November 2022 and 8 November 2023 have left indelible scars upon all of us. Scars we will have to live with for the rest of our lives. Scars with which we will continue to work.
Faced with the unprecedented surge in violence over the past month in Palestine, and particularly in the Gaza Strip, we remain deeply concerned for the lives and health of all our colleagues on the ground. Some of whom work in hospitals. Their safety, and that of all our teams around the world, will always remain our top priority. We are therefore relentlessly repeating our call for a ceasefire and the deployment of humanitarian aid.
One other word must also be used today. That word is “anger”. It too is infinite. We denounce these inhumane and intolerable attacks in the strongest possible terms. These tragedies make us even more determined to advocate for compliance with international humanitarian law and the protection of civilians.
Today, we are wounded. We are bruised by these losses. We might feel powerless. But, in the face of adversity and the brutality around us, our convictions remain intact. As does our determination to continue to fight for justice and humanity.
In memory of our colleagues, we will never stop working with people living in crisis situations. We will never stop fighting for access to rights and healthcare, here and elsewhere.
We owe it to Maysara.
We owe it to Alem.
To conclude, we would like once again to express our condolences and support to their families and teams. We would also like to thank our colleagues who are supporting the families of the deceased. And to the many people who sent messages of support, which will be given to the teams and their families.
We salute you, Maysara.
We salute you, Alem.
In memory of our two colleagues and their commitment, we now invite you to observe a minute’s silence.
[…]Thank you for attending and for your support.
Hommages
Tributes
Soutien à nos équipes en Palestine
Support for our teams in Palestine
« Les adieux les plus difficiles sont ceux que vous ne pouvez faire qu’après qu’une personne ait cessé de respirer »
Le message de la famille d’Alem Mulugeta Getahun – Adressé le jeudi 16 novembre 2023
Les adieux les plus difficiles sont ceux que vous ne pouvez faire qu’après qu’une personne ait cessé de respirer, quand vous êtes confrontés à son corps sans vie et que les mots vous manquent parce que rien ne vous préparait à ce genre d’expérience. Ce jour-là, nous pourrons enfin parler du voyage d’Alem ainsi que du nôtre. Cette année n’a pas été facile à gérer en son absence ; chaque jour est différent, et nous attendons toujours son appel même si la réalité est tout autre. Notre fille, Mme Alem Mulugeta, était employée de l’ONG Médecins Monde. Elle a été brutalement tuée alors qu’elle travaillait. Mme Alem Mulugeta Getahun a condamné avec la plus grande fermeté le comportement du soldat nigérian le 17 novembre 2022. Alem est née à Tigray, Mekele, et a grandi à Addis Abeba. Elle a fait ses études à Addis Abeba, a obtenu son diplôme de licence de l’Université de Hawassa et a travaillé pour différentes entreprises à des postes administratifs pendant 14 ans. Grâce à son dévouement et son excellence, elle a obtenu différents certificats à différentes occasions. Alem était une personne enjouée, joyeuse, altruiste, dévouée, loyale et attentionnée. Enfin et surtout, nous tenons à exprimer notre gratitude à tous les employés de Médecins du Monde, au ministre des Affaires étrangères éthiopien, au gouvernement nigérian et à tous les anciens collègues d’Alem. De la part de sa famille : |
“The hardest goodbye is the one where you don’t get to declare it until they are no longer breathing”
Message from the family of Alem Mulugeta Getahun – Sent on Thursday 16 November 2023
The hardest goodbye is the one where you don’t get to declare it until they are no longer breathing, the one where you face to face with their lifelessness and you don’t have the word to express it because this kind of goodbye wasn’t expected. On this day, we will finally be able to speak about Alem’s journey as well as our own. This year was not easy to deal with her absence; every day is not the same, and we always expect her call even though the reality was opposite. Our daughter, Ms. Alem Mulugeta, was an employee of the NGO Médecins du Monde. She was killed brutally while she was on duty. Ms. Alem Mulugeta Getahun has condemned in totality the unruly behavior of the Nigerian soldier on November 17, 2022. Alem was born in Tigray, Mekele, and raised in Addis Ababa. She attended her education in Addis Ababa, got her bachelor’s degree from Hawassa University, and has worked for different companies in administrative positions for 14 years. For her dedication and excellence, she has gotten different certificates on different occasions. Alem was a playful, cheery, selfless, dedicated, loyal, and caring person. On the day she died, she called and had a deep conversation with her family and told them when she would be back at her residency place in Maiduguri. On November 17, 2022, at 10:45 p.m., we received a phone call from Ms. Fanny. told us that she was killed at the airport, but it took us 12 hours to confirm. It was the worst day of our lives. We expected her call even after the confirmation, but it is what it is, and it was God’s will, so we accepted her death and got her body on the 8th day. The funeral was held at the Trinity Cathedral Orthodox Church, and we are thankful and grateful for those who attended the funeral ceremony and shared our mourning. And still, we are seeking justice for her, and we don’t want another employee or family member to experience this feeling in the future. We hope she will be remembered for her dedication, hard work, teamwork, playfulness, and loyalty as an employee of Médecins du Monde, a colleague, a friend, and a daughter-sister mother. Last but not least, we want to express our gratitude and appreciation for all Médecins du Monde employees, the Ethiopian foreign minister, the Nigerian government, and Alem’s former colleagues from different companies. From her family: |
Je tiens encore une fois à exprimer mon soutien à la famille de ces courageuses personnes dans ce moment difficile. Puisse leur souvenir estomper le sentiment de douleur que leur disparition a laissé.
Bei hommage, touchant! Merci pour leur famille. C’est tellement injuste. Tant de morts inutiles au nom de la guerre!