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édito : au revoir 2021, c’est parti pour 2022 !
On les écoute (podcast) : trois témoignages de jeunes en errance
Rencontres MdM Normandie, 35 ans déjà. Sophie, Christian et Thierry livrent leurs précieux témoignages sur l’évolution de la délégation.
Opération Colombes
Rencontre avec le nouveau CA : Carine Rolland, présidente de Médecins du monde, et Roberto Bianco Levrin, secrétaire général.
En images : les temps forts de la délégation
Euréka : résultats des mots croisés de la dernière édition
Agendas 2021 et 2022
Faites vos veux
Comité éditorial
Yamina Boukile – Dominique Dumand – Danielle Fourel – Claude Le Bihan- Pascal Lissot – Marine Louvigny – Marie Hélène Peronne – Bernard Vigier
Hier, Aujourd’hui, Demain… au revoir 2021, c’est parti pour 2022 !
La Délégation Normandie de Médecins du Monde a dû faire face à une année complexe dans le sillage d’une longue période marquée par le Covid. Les mesures sanitaires ont mis à mal le lien associatif et notre capacité d’accompagnement des populations que nous recevons et vers lesquelles nous allons.
Nous avons fait face et maintenu l’essentiel de nos missions.
Ce fut une année riche, marquée par de nombreux plaidoyers : accès au logement, prise en compte des Mineurs, soutien aux travailleuses du sexe, coalition de causes communes dans la militance avec le réseau associatif, accès aux droits et à la santé avec la CPAM et la PASS…etc.
Nous continuerons à lutter pour que la CMU et l’AME fassent enfin partie intégrante de la sécurité sociale pour sortir des discriminations.
Nous essayons de nous adapter le mieux possible à un monde en perpétuel évolution (Pandémie, contexte sécuritaire, migration, enjeux écologiques)
Nous le faisons dans le cadre national de la stratégie France afin d’être le plus efficace possible dans nos plaidoyers.
Ce numéro de « Normands du Monde” nous parle du passé, (nous avons fêté les 35 ans de MDM en France), pour mieux comprendre ce qui nous a conduit à nos engagements d’aujourd’hui et de demain. Les témoignages et les images recueillis nous font toucher du doigt cette histoire.
Il était impossible de ne pas évoquer, dans le contexte actuel, la question migratoire, préoccupation des politiques souvent dans une démarche essentiellement électorale.
Nous sommes bien loin de la France Terre d’accueil, Terre des droits de l’homme et nous avons choisi de donner la parole à ceux qui, partant de leur Pays, vivent un long parcours migratoire et ses conséquences dans notre Pays. Nous devons combattre toutes les idées extrémistes qui stigmatisent, rejettent au nom de la sécurité et de la peur.
Pour boucler ce numéro nous vous proposons une palette des temps forts de l’année 2021 en images, de quoi se délecter des bons moments associatifs.
L’année 2021 a vu l’élection d’un nouveau Conseil d’Administration dont Carine Rolland est devenue la Présidente. Avec Roberto Bianco Levrin, elle est venue présenter la dynamique qu’elle impulse au sein du CA pour porter les valeurs de MDM.
L’année 2022 commence par l’élection d’un nouveau collège. Il portera, avec notre équipe salariée
, ces valeurs dans nos programmes, auprès de nos partenaires, au service des populations les plus en difficultés.
Une nouvelle année s’annonce. Continuons nos combats ! Belle année solidaire et militante à toutes et à tous.
Le comité éditorial de la délégation Normandie
On les écoute
A l’occasion de la journée mondiale des migrant(e)s, nous partageons avec vous trois témoignages de jeunes en errance interviewés lors des travaux de la commission d’enquête parlementaire sur les migrations en 2021.
35 ans déjà …
Sophie, Christian et Thierry nous livrent leurs précieux témoignages sur l’évolution de la délégation.
Interview vidéo de Sophie Bénégis, assistante de la délégation depuis 2009
Interview audio de Thierry Choubrac, Responsable de Mission (RM) du programme MNA de Caen
Interview de Christian Cartier, délégué régional de 1988 à 2018
Christian Cartier, dentiste de métier, raconte son expérience de 20 ans en faveur de l’accès aux soins et à la santé des personnes précarisées sur le territoire normand.
Peux-tu te présenter et nous présenter ton parcours à MdM ?
J’ai rejoint Médecins du monde Rouen en 1992 et je suis devenu adhérent de l’association en 1995.
En 1987, le centre pluridisciplinaire de santé de Rouen a été créé par un groupe de soignants rouennais, rue St Nicaise dans le dispensaire de la Croix Rouge qui prêtait ses locaux pour pratiquer des consultations médicales deux après-midis par semaine. En 1990, la Croix Rouge a récupéré ses locaux et MDM s’est installé dans des appartements appartenant à la Mutualité, successivement rue des Tonneliers puis à Bihorel. C’est à ce moment-là que nous avons commencé à pratiquer des dépistages HIV et des actions de prévention en toxicomanie. Les appartements n’étant plus très appropriés, l’équipe de MdM a dû chercher un nouveau local et la mairie de Rouen a accepté de mettre à disposition en 1992 le local que la délégation utilise encore aujourd’hui, au 5 rue d’Elbeuf.
En 1992 on me sollicite pour monter un cabinet dentaire permettant de soigner gratuitement les personnes ne pouvant faire face à des dépenses de santé. A l’époque, beaucoup de personnes n’avaient pas droit à l’assurance maladie. On a fait appel à moi car j’étais depuis 1990 expert dentaire auprès du préfet de Seine Maritime pour les bénéficiaires du RMI qui ne pouvaient prétendre à une prise en charge de leurs prothèses dentaires. Cela me fit connaitre dans les réseaux d’aides aux personnes précaires. Une trentaine de praticiens se sont investis à mes côtés dans ce cabinet.
Nous faisions essentiellement des soins d’urgence. Très vite, nous avons développé dans cette structure le concept du soin efficace en une seule séance. En effet cette population, souvent marginalisée, ne venait au cabinet que très tardivement et, une fois soulagée de leur douleur, il était rare que les personnes reviennent pour poursuivre les soins lors d’autres rendez-vous.
Ce concept révolutionnaire pour la pratique dentaire de l’époque et appliqué pour une population précaire, se trouva approuvé scientifiquement par la suite car évitant effectivement beaucoup de problèmes infectieux liées à la multiplication des séances. Il est maintenant, préconisé pour l’ensemble des populations. Le cabinet efficace de MdM eu un grand succès et malgré le nombre de praticiens s’y engageant nous avions du mal à répondre à la demande. Cette réussite ayant été remarquée par les instances parisiennes de l’association, je fus sollicité pour prendre des responsabilités nationales dans l’association (comité de pilotage des missions France de MdM) et des responsabilités régionales de l’association (Délégué Régional de MdM).
Je suis resté 20 ans Délégué Régional de Normandie, élu successivement 9 fois par les adhérents de Normandie. Ainsi j’ai participé à de nombreuses réunions et colloques qui ont contribués à faire prendre conscience à nos décideurs de l’urgence d’une meilleure prise en charge des populations fragilisées. Les grandes satisfactions de mon engagement à MdM sont d’avoir (modestement) contribué à améliorer des accès pour une meilleure santé pour tous.
A quelle étape, à quel moment avez-vous intégré des salariés ? Était-ce une volonté de MdM Normandie ou de MDM Siège ?
L’association a dû s’adapter aux nouvelles demandes de nos bailleurs qui souhaitaient de plus en plus de documents pour financer nos projets. Nous, bénévoles en activité professionnelle, n’avions pas les compétences ni le temps pour constituer efficacement les dossiers de subventions. Il a fallu progressivement engager du personnel salarié compétent pour remplir ces fonctions administratives au niveau national, mais aussi au niveau local. Pour certaines actions tel que la prévention ou les actions à l’étranger demandant un engagement de plusieurs mois, nous avons dû s’adjoindre des compétences de personnels salariés. Ces évolutions ont modifié la sociologie de l’association qui progressivement est devenue, une structure qui emploie plus de 500 salariés de droit français et de plus de 1500 salariés de droit national des pays aidés.
Le premier poste salarié obtenu pour l’antenne de Rouen a été en 1994 celui d’une secrétaire à temps partiel et il a fallu argumenter pour l’obtenir.
En région l’obtention des postes salariés n’a jamais été systématique. Les demandes étaient traitées au cas par cas. Le protocole pour les obtenir a toujours été complexe et changeant. Il a toujours été soumis à l’acceptation des directions salariées du siège et du CA. En tant que Délégué régional, il a fallu bien souvent que j’insiste en mettant tout mon « poids » pour obtenir les postes dont nous avions besoin.
En tant que Délégué Régional de Normandie, je défendais la régionalisation dans les instances nationales de l’association. J’y voyais un avantage permettant de mieux coller à la réalité du terrain et d’avoir un meilleur impact sur les changements sociétaux que nous souhaitions.
J’y voyais aussi un intérêt politique. Un pouvoir régional favoriserait des initiatives locales et une implication au bénévolat de personnes isolées partageant nos valeurs et nos volontés de changement, qui trouveraient au sein d’une association proche d’eux, une justification de leur conviction et un moyen de promotion de leurs idées.
Par ricochet, ces nouveaux membres donneraient plus de poids à l’association. Je croix à la société civile comme vecteur du changement. Plus il y a de « Médecins du monde » plus on pourra faire évoluer les mentalités. De manière globale, le changement sociétal se fera par la prise de conscience et le vote des personnes lors des suffrages régionaux et nationaux pour les différentes instances décisionnelles. Les représentants ainsi élus démocratiquement permettront ces évolutions. Il est évident que ce concept n’est pas très révolutionnaire, il est réformateur.
Les Délégations Régionales étaient surtout considérées comme des courroies de transmission des décisions du siège parisien. L’association est très jacobine dans son fonctionnement. Mes détracteurs caricaturaient cette vision de la régionalisation comme étant la rupture avec le reste de l’association en créant une indépendance régionale.
Nous avons malgré tout obtenu une certaine reconnaissance et une certaine forme d’autonomie était acceptée, soumise au contrôle du siège de l’association. J’ai insisté pour que les Régions soient dotées de moyens pour affirmer leur existence, notamment un poste de « coordinateur régional » salarié de haut niveau de compétences
Peux-tu nous lister les différentes étapes entre la création de MDM Normandie et ton départ ? Les moments clefs ? Les moments forts ?
- 1987 Création de l’antenne de Rouen, de celle du Havre
- 1992 MdM Rouen emménage au 5 rue d’elbeuf. Création du cabinet dentaire de MdM Rouen
- 1995 Création de l’antenne mobile de Rouen pour « Allez vers » vers les toxicomanes pour les échanges de seringues. Vers les personnes à la rue, les gens du voyage et vers les personnes des quartiers défavorisés (haut de Rouen, st Etienne du Rouvray) pour diffuser des messages de sensibilisation et de préventions vers les terrains des gens du voyage
- 1996 Création de la réunion hebdomadaire du lundi matin avec tous les bénévoles
- 1998 création du programme de prévention pour les travailleuses du sexe
- L’équipe de MDM Rouen a organisé des interventions à l’étranger (soutien auprès des populations en souffrance) par des missions de ses bénévoles avec des livraisons de matériel d’urgence et d’hygiène en Pologne (3 voyages de 1988 à 1992), en Roumanie (1991), à Cuba (1997), au Kossovo (1999)
- En 2003 l’équipe de soignants de MDM Rouen accompagna la grève de la faim des « Sans Papiers » rouennais qui demandaient une régularisation de leurs statuts.
2006 Réunion de la Basse Normandie et de la Haute Normandie en une seule délégation
- Fin 2012 La municipalité de Rouen nous a octroyé le rez-de-chaussée de l’immeuble. Cela nous a permis, après avoir trouvé le financement, d’effectuer les travaux nécessaires pour pratiquer les consultations médicales au rez-de-chaussée (précédemment, elles avaient lieu au deuxième étage de l’immeuble)
- 2013 Création d’un poste salarié de coordinateur régional
- 2014 Fermeture de l’antenne du Havre
- 2014 Création de l’antenne de Caen
- 2016 Université d’automne à Rouen
Comment as-tu analysé, perçu le changement des populations accueillies au sein de MDM Normandie ?
MdM est une association militante. Dans le monde, et surtout en France, au-delà des soins dispensés à une population fragile, l’association MdM, forte de sa pratique de terrain, revendique des changements pour la prise en charge des populations en situation de précarité. Le plaidoyer est donc une part importante de notre investissement. Cela a permis de modifier la prise de conscience de nos décideurs et de modifier certaines lois.
Le rôle de Médecins du Monde n’est pas de se substituer aux services de l’Etat mais de palier ses insuffisances, jusqu’à obtenir une reconnaissance et une prise en charge des populations que nous assistons.
Au début des années 90, la population toxicomane, pour laquelle des actions ont été menées à Rouen, a été mieux prise en considération avec les actions de substitution, d’échange de seringues, des tests dans les raves party. Une fois que l’Etat a pris en charge cette population nous avons arrêté nos programmes vis-à-vis de cette population.
Les personnes françaises sans couverture médicale fréquentant notre centre de soins ont pu être pris en charge par le droit commun à partir de 1998 par la loi sur la couverture médicale universelle. En 1999, MdM a en effet contribué à la création de la CMU (couverture médicale universelle). Cette loi permet à tous les ressortissants français ayant peu de revenus de se faire soigner gratuitement par les professionnels de santé de leur choix. En 2000 la création de l’AME (aide médicale d’état) permit aux étrangers séjournant sur le sol français d’être également pris en charge. Ainsi, théoriquement, toute personne qui réside sur le territoire français peut être prise en charge pour ses soins médicaux, les plus pauvres l’étant gratuitement.
Progressivement ce public n’a donc plus eu besoin de nous en théorie.
La population des gens du voyage a trouvé elle aussi, en partie grâce à l’action de MdM une meilleure reconnaissance de la part des pouvoirs publics.
Les travailleuses du sexe ont eu, grâce à MdM, accès à la prévention.
Les étrangers sans droits ont obtenu, grâce à la création des PASS, l’accès aux soins en attendant l’obtention de leur AME. Mdm a évidemment fortement contribué à cette évolution. Mon dernier combat à MdM fût d’aider les migrants, notamment les mineurs étrangers, à obtenir des droits et l’accès aux soins dans notre pays.
Toutes ces évolutions ont modifié la sociologie des personnes fréquentant notre centre. Malheureusement, dès qu’une population est prise en charge de manière satisfaisante, une autre sollicite notre intérêt et demande de l’aide. C’est ainsi, qu’en Normandie, nous avons dû nous avons dû mener des actions en faveur de la population migrante et notamment des mineurs étrangers non accompagnés en les soignant et en revendiquant la mise place de leurs droits liés à leur minorité.
A l’occasion des 35 ans des actions de MdM en France et en particulier à Rouen, la délégation a participé à l’opération Colombe qui s’est déclinée dans 12 antennes à travers la France avec des artistes locaux
Les temps fort de la délégation en images
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