Yannick Le Bihan
directeur des opérations France
Christian Reboul
référent plaidoyer migration, droits et santé
Christophe Vavasseur
coordinateur régional Ile-de-France
Réponses aux questions
A-t-on une idée du coût de l’évacuation de ces campements depuis 2014 ? sûrement plus cher que de mettre en place des structures d’accueils !
Une tentative de chiffrage de ces coups avait été tenté il y a quelques années au sujet des bidonvilles mais force est de constater que l’information est difficile à obtenir. Néanmoins on estime que le cout est significatif tant il mobilise des moyens policiers, humains, administratifs et logistiques, y compris en dehors des séquences d’évacuation pour empêcher la reconstitution de campements sur certains sites. L’argent économisé aurait été plus utile au renforcement des capacités de l’logements et d’hébergement des populations précarisées.
Est-ce que MdM participe officiellement à la marche de demain ?
L’association encourage chacun de ses membres à y participer mais il n’est pas prévu de représentation officielle de MDM à la marche.
Va-t-on s’associer à MSF sur la plainte contre la préfecture de police ?
Le Bureau MdM du 27/11/2020 a validé notre participation à la plainte qu’a annoncé MSF.
Les collègues de Paris et St Denis sont-ils/elles en lien avec les personnes exilées qui ont subi des violences ? Des consultations en santé (physique et mentale) ont-elles pu leur être dispensées ?
L’équipe de la Veille Sanitaire fait des sorties régulières au long de l’année trois fois par semaine sur les campements avec un camion et/ou barnums médicalisés. Lorsque les camps sont évacués, l’équipe fait des sorties sur un mode plus mobile et en véhicule léger afin de rechercher les exilé.e.s qui n’ont pas bénéficié de place d’hébergement ou ont été remis à la rue, et ainsi leur venir en aide sur des sites dispersés dans des recoins du nord de Paris. Un Permanence Psy et Juridique se tient aussi chaque mardi après-midi pour les personnes exilées qui en expriment le souhait lors de ces sorties.
C’est grâce à ces dispositifs que des personnes exilées ont effectivement été accompagnées par les équipes MDM lors de ces évènements : soins et orientations pour blessures (avec établissement de certificats), consultations psy. Nous avons aussi apporté une aide à un personnel d’une association partenaire choqué par ce qu’il a vu et subit.
Les équipes MDM n’ont pas subi de violences directes mais les violences vues ou rapportées ont choqué.
Pourquoi les camps de réfugiés comme dans les autres pays ne sont pas mis en place ? C’est quand même affreux de voir que les exilés sont accueillis dans des “meilleures” conditions au Sud Soudant qu’en France !
La question s’est posée en effet et se pose toujours. Nous considérons, ensemble avec l’inter-associatif, que le gouvernement français peut se donner les moyens d’un accueil digne et conforme aux engagements internationaux. Constituer un « camp de réfugiés » sur le modèle utilisé lors des crises à l’international, et qui perdurent souvent des années voire des décennies, serait donner l’opportunité au gouvernement de se désengager encore davantage et de se reposer sur des associations « opératrices » pour en assurer la gestion. Cela créerait aussi un point de fixation géographique mais aussi symbolique, qui concentrerait à la fois les regards et les instrumentalisations de tout ordre. Pour l’heure, les « mises à l’abris » ont toujours été menées, même si c’est de façon toujours plus dégradée, impréparée et brutale. Rien n’est à exclure cependant.
Les personnes exilées souhaitent-elles cette médiatisation et comment ont-elles vécu le fait qu’on leur propose d’être visibles sur la place de la République et qu’elles ne finissent pas subir une telle violence ? Quid de la confiance envers nos assos ?
La question est d’importance et s’est posée. L’évacuation du campement de Saint-Denis advenue une semaine plus tôt a laissé de nombreuses personnes dispersées dans les recoins du nord parisien. Elles ont subi la traque et les violences policières pendant plusieurs nuits de façon totalement invisible. Une partie d’entre elles a souhaité visibiliser leur situation et s’est tournée vers les associations qui leur sont les plus proches pour organiser l’opération de la Place de la République. Une forme d’Assemblée Générale a été constituée pour l’occasion et constitue le modèle pour d’éventuelles futures nouvelles opérations.
Comment vont les équipes ?
Les équipes vont bien, elles ont été secouées par tous ces évènements mais sont malgré tout satisfaites que cette séquence a permis de faire apparaitre au grand jour ce qu’elles dénonçaient depuis plusieurs années : conditions d’évacuation des camps, violences policières. Il est à espérer que cela fasse sensiblement bouger les lignes.
L’équipe bénéficie régulièrement de supervisions d’équipe. Il y en aura une cette semaine. Tous les salarié.e.s peuvent aussi bénéficier d’un soutien psy individualisé.
Il y aussi une augmentation des expulsions de bidonvilles malgré la crise sanitaire, sans relogement. Constate-t-on aussi une augmentation des violences policières lors de ces expulsions ?
Les expulsions de bidonvilles sont toujours des moments violents et jamais suffisamment préparés. Par exemple, détruire les habitations sous les yeux des habitants ou quadriller le site avec des forces de l’ordre qui ensuite investissent les lieux à marche forcée constituent des scènes très difficiles à vivre.
Bravo pour tout ce travail en collectif inter assos ! est-ce que le ministère de la santé se bouge pour protéger les exilés du covid ???
Le ministère de la santé est malheureusement en retrait de ce dossier, c’est le ministère de l’intérieur qui est en première ligne sur la question des exilés. Les ARS sont bien dépourvues devant les Préfectures.
Qu’est qu’on fait concrètement ?
On peut se référer à la question 4 concernant les activités d’accompagnement des exilé.e.s.
La stratégie de plaidoyer actuelle consiste en la saisine de la Défenseure des Droits dont on espère qu’elle parviendra à obtenir que tous les acteurs concernés puissent discuter ensemble afin d’établir des modalités de prise en charge dignes et conformes aux engagements internationaux pour mettre fin à ce cycle infernal de non-accueil, campements, évacuations, dispersions, reconstitution de campements. La saisine a été effectuée ce lundi 30 novembre. En continue et quand cela est pertinent, des interpellations ont lieu sous diverses formes (réseaux sociaux, courriers officiels aux Préfectures et Mairies…).
MdM avait refusé de s’associer à la constitution d’un campement en juin à Paris au motif que cela exposait les personnes. Qu’en est-il aujourd’hui ?
En juin, l’organisation était différente. De plus, cela concernait des mineurs dont nous n’étions pas certains qu’ils mesuraient l’ensemble des enjeux et des conséquences.
En novembre, la situation était différente, il s’agissait d’adultes, que les autorités avaient mis dans une situation encore plus compliquée par l’évacuation calamiteuse du camp de Saint Denis le 17 novembre. Enfin, La réponse inter associative était plus structurée à l’occasion de l’installation Place de la République.
Comment analyse-t-on les réponses de l’IGPN (police des polices), remises ce matin ? Elles ne concernaient que trois cas relevés en rapport avec toutes les exactions relevées par nos associatifs sur place…
Nous avons très peu de raisons de croire que l’IGPN puisse jouer un rôle important dans la remise en question des violences policières et du schéma du maintien de l’ordre.
Y a-t-il une trêve des évacuations l’hiver ? à l’image des trêves d’expulsion ?
Nous appelons ces évacuations de nos vœux car les conditions d’habitat sont une mise en danger imminentes des habitants. La question est surtout celle de la mise à l’abris réelle et durable et de l’accompagnement proposé aux personnes. Ces aspects-là sont très déficients : hébergements souvent en gymnases, remises à la rue fréquentes après quelques jours ou semaines, suivis sanitaire, social et juridique déplorables, et absence d’information.
Nous nous questionnons toutefois sur l’opportunité d’appeler à de nouvelles mises à l’abris futures. En effet, la stratégie des pouvoirs publics de faire en sorte que les campements se reconstituent toujours plus loin de Paris invisibilise la situation et éloigne les exilés des associations et collectifs de soutien basés historiquement à Paris.
Fait-on un lien avec ces 3 dernières semaines, le doublement des effectifs de police aux frontières puis le recul sur l’AME ?
On ressent effectivement un durcissement des autorités sur la question migratoire en général et aux frontières en particulier. Cela touche tous les domaines dont celui de la santé avec une restriction de l’accès aux droits et aux soins avec ces mesures concernant l’AME pour les personnes en situation irrégulières et même pour les demandeurs d’asiles.
La marche des libertés (renommée ainsi avec des acteurs de celle des solidarités) appelle demain à ne pas accepter que la manif soit interdite. MDM peut-il appeler officiellement ?
Comme indiqué à la question n°2, l’association encourage chacun de ses membres à y participer mais il n’est pas prévu de représentation officielle de MDM à la marche
On porterait plainte sur quoi ? sur quelle base ? on demande quoi?
La plainte porte sur les violences volontaires et les destructions de biens.