Un véritable apartheid laisse le monde entier indifférent et coupable

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Visite terrain en Palestine, à Gaza puis en Cisjordanie. Un état morcelé en deux, si tant est que l’on puisse encore parler d’un « État », tant le contexte se dégrade. La situation s’obscurcit sous les yeux d’une communauté internationale absente, sinon complice, de l’effacement programmé, juridique et citoyen, de cinq millions de personnes.

A Gaza, remarquable résilience et étrange impression de ville normale

A Eres, l’unique poste de frontière permettant le transit entre Israël et la bande de Gaza, un hangar gris, immense, triste, vide, sans âme. Au froid contrôle des passeports succède une grosse heure d’attente. S’ensuit la traversée d’une sorte de long couloir de quasiment un kilomètre. En plein air, grillagé, il préfigure la prison à ciel ouvert qu’est devenue cette portion de territoire, de 50 km de long et 6 km de large. D’un côté comme de l’autre, il est impossible d’en sortir, sans motifs professionnels et sanitaires strictement encadrés.

Et pourtant, dans Gaza City, une étrange impression de ville normale. Ses commerces, ses restaurants, son port et son bord de mer, dans un environnement totalement surréaliste. L’économie est au plus bas, exsangue. 

La population civile subit, avec une résilience remarquable, depuis 2007, les effets conjugués du blocus israélien, de la fermeture de la frontière sud avec l’Égypte et de l’affrontement entre l’autorité palestinienne et le Hamas. Les conditions de vie sont extrêmement difficiles. Depuis un an, malgré tout, la population lutte et manifeste sans relâche, avec dignité et conviction, en dépit des nombreux morts et blessés lors de la Grande marche du retour commémorant la Nakba, l’exode palestinien de 1948 lors de la première guerre israélo-arabe.

Retour à la frontière. Passage brusque, sinon brutal. Scanner intégral sous le regard haut perché de personnes vous scrutant, valise intégralement fouillée et rendue dans un désordre total. Le tout dans une atmosphère d’humiliation résignée, à bas bruit.

 

En Cisjordanie, les collines se succèdent, les colonies s’étendent 

Deux heures de route jusque Naplouse, en Cisjordanie (West Bank pour les anglophones), la deuxième ville de cette portion d’État palestinien. Des collines verdoyantes se succèdent, parsemées ici et là de villages, tantôt palestiniens tantôt israéliens. Ces derniers sont bordés de barbelés et de check-points avec des routes barrées, interdites, rendant les accès considérablement plus longs pour les habitants palestiniens. Les colonies israéliennes, de plus en plus étendues, dessinent une espèce d’archipel improbable où « s’entassent » 3 millions de palestiniens, encerclés par près de 500 000 colons. Leur nombre ne cesse d’augmenter, rendant toute solution politique improbable, sinon impossible.

Par ses programmes, MdM apporte un appui constant en santé mentale (thérapeutique, éducationnelle, préventive)  et en soutien psycho-social dans près de 140 villages soumis à ces violences insoutenables. Imposées par des colons extrémistes, elles sont malheureusement soutenues et encouragées par l’armée israélienne. Les agressions multiples, à coup de pierres et d’armes à feu, les arrestations sans causes, les démolitions de maisons de plus en plus fréquentes, de multiples intimidations, des procès et recours voués à l’échec dressent un tableau insupportable et absurde.

Impression de gâchis sans fin et cruel, teintée de révolte et de colère. Au détriment de populations instrumentalisées, dépouillées, humiliées et violentées. L’idée de deux états n’est plus d’actualité. L’annexion pure et simple se profile, reléguant les victimes à un rang secondaire et subalterne, sans espoir. S’apparentant à un véritable apartheid qui laisse le monde entier indifférent et coupable.

 

Khan Younis
Centre pour enfants et jeunes de Culture and Free Thought Association (CFTA)
Photo de Saleem TARAZI, responsable logistique à Gaza

 

 

 

 

 

 

 

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