Depuis mi-octobre 2018, un grand mouvement de migrants, venus du Honduras puis du Salvador, s’est mis en marche pour rejoindre les Etats-Unis. Une première caravane de plus de 2 000 honduriens composée de femmes avec enfants, de personnes âgées, d’hommes seuls ou en famille, tous avec un minimum de bagages, est arrivée au Mexique. Cette caravane a pris de l’ampleur en cours de chemin pour dépasser 8 000 personnes. Plus de la moitié d’entre elles retourneront dans leur pays et les autres continueront leur progression.
Fin octobre, quatre caravanes se sont succédé, les deux premières venant du Honduras et les deux suivantes du Salvador.
Le contexte de violence et de pauvreté généralisées pousse ces milliers de personnes aux déplacements forcés. La question de la survie est prioritaire, surtout au Honduras et au Salvador, car la population est exposée à la violence des « pandillas » ou « maras » (bandes organisées extrêmement violentes qui persécutent les familles, cherchant à enrôler leurs adolescents avec des menaces de mort). Pour beaucoup, quitter son pays d’origine équivaut à sauver sa vie.
La première caravane s’est déroulée dans une relative tranquillité avec un bon accueil de la population locale, leur apportant eau et sandwiches. Les caravanes suivantes sont plus petites, la 2ème caravane de 1 500 à 2 000 personnes a rencontré plus de difficultés, des tensions et même des heurts de la part des policiers et de la population avec quelques scènes de violence, en particulier à la frontière mexicaine, lieu de grande concentration humaine, où le flux s’est vu très ralenti. Puis a suivi la 3ème caravane, composée de 600 personnes, et la 4ème de 1 500 personnes. Chemin faisant, des migrants nicaraguayens et guatémaltèques ont rejoint les caravanes.
Lors de la première caravane, au niveau du rio Suchiate, pour échapper au contrôle mexicain, le passage de la frontière s’est fait par le fleuve sur des embarcations (barges) constituées de gros pneumatiques recouverts de planches. À Ciudad Hildalgo, premier village mexicain situé après le passage de la frontière Guatemala – Mexique, les autorités migratoires ont mis en place un enregistrement avec proposition d’hébergement provisoire ou obtention de places en refuge ainsi que de l’information.
Présent durant ce passage, Médecins du Monde a installé des containers d’eau qui ont été détruits lors des affrontements et remplacés. MdM a proposé des consommables pour la désinfection, pour l’hygiène quotidienne, pour pallier la déshydratation, ainsi que de l’aide aux services de santé publique mexicains avec l’achat de médicaments et du carburant. Avec le centre de santé local, MdM a organisé des consultations de soins de santé primaire sur le pont à la frontière. Une permanence des urgences 24h/24h a été ouverte dans les périodes les plus tendues.
A Tapachula, première grande ville mexicaine à 30 km de la frontière, dans l’Etat du Chiapas, un centre de détention Feria Mesoamericana d’une capacité de 10 000 personnes a été mis en place pour accueillir et enregistrer les migrants avec logement temporaire sous tente. Un permis de circulation d’un mois leur a été attribué ainsi qu’une aide aux informations concernant leur trajet.
Depuis 2017, MDM-France et MDM-Espagne participent, à travers une mission mixte, à l’aide à l’accès aux soins de santé des migrants de Mésoamérique dans les quatre pays : Honduras, Salvador, Guatemala et Mexique. Les activités sont médicales, avec des consultations psychosociales et médicales dans des refuges pour enfants migrants, et de la formation du personnel de santé. Elles comprennent également un volet fort de défense des droits humains des migrants et un travail de plaidoyer avec la société civile et les instances institutionnelles.
Plus tôt dans l’année, en mars 2018, une autre caravane de 1 400 personnes était partie du Honduras accompagnée de l’ONG Pueblo sin Frontera mais s’est dissoute en avril aux environs de Mexico sans atteindre la frontière américaine.
Aujourd’hui, la première caravane se trouve à une semaine de route de Mexico. Pour ceux qui ont pu obtenir une libre circulation au Mexique, un mois leur a été accordé. La traversée de la frontière aux Etats-Unis, pour ceux arrivant depuis Oaxaca, pourrait se faire du côté Ouest vers Tijuana. Les nouvelles venant du gouvernement Trump sont de plus en plus inquiétantes, avec l’annonce de 15 000 militaires (autant que dans le conflit afghan) placés à la frontière américaine, dont la mission serait d’empêcher l’entrée de ces migrants en condition irrégulière.
Quelle que soit l’issue de cette immense marche, très risquée, elle met en évidence la précarité des conditions de vie des participants, dont certains disent : « Nous ne cherchons pas une vie meilleure, mais seulement une vie ».