Sur les traces de l’Odyssée d’Ulysse, la metteure en scène Chiara Villa porte son théâtre citoyen parmi la trentaine de caravanes des Roms, installées par la ville de Strasbourg dans l’espace temporaire d’insertion Hoche – à 12 km du centre-ville. MdM Alsace – Franche Comté faisait partie des invités et spectateurs enthousiastes.
Certains parlent de camp en raison des grilles qui clôturent l’espace, gardé par des agents de surveillance. Sur ce terrain militaire dit du fort Hoche, au sud du Rohrschollen, réquisitionné par la préfecture à la demande de la ville, 110 personnes originaires de Roumanie et de Hongrie ont été relogées après la fermeture du bidonville de Saint-Gall à Kœnigshoffen. Le campement est géré par la Croix-Rouge départementale.
Mandatée par la Ville, la metteure en scène anime un atelier qui au prisme de l’art théâtral, valorise leur culture, leurs histoires de migrations, leurs vies en butte à l’exclusion, la violence. Ils s’appellent Giovanni, Bianca, Vasilev, Gaspar, Denis, Manta, Girogetta, Dama, Ionnut, Viorica, Florina, Adelina. Avec eux, Chiara Villa a inventé une langue tramée d’italien, d’espagnol, de roumain, et de bribes de français. Par le truchement de cinq objets choisis, chacun (e) médiatise son odyssée et s’approprie la langue de Molière. L’acte 1 rejoue les préparatifs de départ dans une ébauche portée par le saxophone de Giovanni.
Giovanni au saxophone et Ion-Darius au piano synthétiseur, ont créé l’ambiance tzigane pour annoncer le spectacle, accompagner l’atelier théâtre puis les chants d’Adelina, et enfin nous faire danser et nous retrouver autour d’un verre de l’amitié.
L’atelier théâtre a consisté en des témoignages de 5 femmes (dont Adelina, Viorica, Anita et Gianina) et deux hommes, les deux musiciens, sur leurs histoires et leurs rêves. Des objets avaient été choisis et servaient de trame pour ces témoignages : un sac à main, une statuette, une poupée, et pour presque tous un papier officiel d’identité…
Témoigner au micro dans une langue française en cours d’apprentissage était émouvant et encourageant. Le chant et la musique ont confirmé la richesse de leur culture. Bravo et merci à Chiara Villa d’avoir facilité cela.
Nous étions une cinquantaine de spectateurs, dont une trentaine du Fort Hoche et une vingtaine d’invités : il y avait un journaliste amateur, une représentante de la maison de l’enfance de la Ganzau toute proche, des personnes de l’école d’architecture du quartier de la gare, un étudiant en droit, des bénévoles de plusieurs associations dont un chauffeur de Médecins du Monde. Certains étaient invités ; d’autres avaient appris l’événement dans le journal, occasion d’approche entre la communauté tzigane et nous.
Les acteurs et les musiciens ne semblent demander qu’à reproduire ce genre d’occasion, au fait, c’était l’Acte 1 ! Il y aura un Acte 2 ?
Vincent Leport
Cette article est paru dans la dernière édition de L’Horloge et la Cigogne, journal interne de la délégation Alsace – Franche-Comté