Photo prise par Julien Chauveau dans le métro
Illusoire de présenter le roman: Boussole de Mathias Enard est au cœur de nos réflexions sur l’autre ou l’altérité.
Il l’a dédié, entre autres
au cercle des orientalistes mélancoliques
à ses vieux maitres
à ses amis de Paris de Damas et de Téhéran
et aux syriens
Les critiques littéraires et éditoriales foisonnent d’éloges et d’admiration.
Je ne les consulterais qu’après la lecture.
C’est un tapis volant
Une boussole qui a perdu le Nord
C’est une longue nuit, une nuit des mille et une nuit
qui commence ainsi :
Nous sommes deux fumeurs d’opium chacun dans son nuage, sans rien voir au-dehors, seuls, sans nous comprendre jamais nous fumons, visages agonisants dans un miroir, nous sommes une image glacée à laquelle le temps donne l’illusion du mouvement, un cristal de neige glissant sur une pelote de givre dont personne ne perçoit la complexité des enchevêtrements, je suis cette goutte d’eau condensée sur la vitre de mon salon, une perle liquide qui roule et ne sait rien de la vapeur qui l’a engendrée, ni des atomes qui la composent encore mais qui, bientôt serviront à d’autres molécules, à d’autres corps, aux nuages pesant lourd sur Vienne ce soir : qui sait dans quelle nuque ruissellera cette eau, contre quelle peau, sur quel trottoir, vers quelle rivière, et cette face indistincte sur le verre n’est mienne qu’un instant, une des millions de configurations possibles de l’illusion…
(extrait des premières phrases du livre)