Jossye et Meliza – originaires du Honduras
photo de Nadja Massun pour MdM
Au Honduras, Jossye a élevé ses trois enfants toute seule. Commerçante, elle a dû abandonner son affaire pour des questions de sécurité : avec la crise économique, les braquages se multipliaient. Dans un pays où « la femme ne vaut rien »… Son fils aîné a 20 ans, il est marié et autonome, mais le cadet, qui n’a que 15 ans, souffre de problèmes cardiaques. Le pacemaker dont il risque d’avoir besoin coûte cher.
Meliza, 25 ans, a étudié le commerce et obtenu sa licence, mais elle a dû migrer parce qu’il est impossible de trouver un emploi stable dans le contexte actuel. Elle a laissé sa fille de 2 ans à sa mère, une super grand-mère, heureusement !
Aujourd’hui les deux inséparables servent dans un bar. Au début elles n’étaient pas habituées à ce qu’on les appelle par des petits noms, à ce qu’on les touche, à ce qu’on les pince… Certains clients vulgaires tentent d’abuser, la première fois Jossye a rétorqué par un coup de bouteille sur la tête !
Meliza et Jossye sont arrivées à Tapachula invitées par une cousine à qui elles sont reconnaissantes de les avoir aiguillées sur un bar où le patron est correct. Il les défend quand les clients exagèrent et appelle des taxis pour qu’elles ne rentrent pas toutes seules à l’heure dangereuse. Elles sont ici pour rester, au moins un certain temps, celui d’économiser assez d’argent pour monter de nouveaux projets. D’ici là, elles voudraient faire venir leurs enfants.
Meliza et Jossye ont été victimes du harcèlement d’une femme de 35 ans, puis de son mari. Après des invitations amicales, ils ont entamé des manipulations assez perverses en essayant de briser leurs liens. En accusant l’une à tort, en mentant à l’autre puis en menaçant de les attaquer en justice. Ce procédé, qui peut durer des longs mois, est malheureusement un « classique » reconnaissable de tentative de traite. Fort heureusement elles ont été soutenues à temps par MdM et Brigada.
Aujourd’hui Meliza et Jossye sont des promotrices assidues. Elles viennent parfois à pieds aux réunions le matin pour économiser le transport et acheter à manger. L’après-midi, elles travaillent. Aux ateliers de journalisme où elles apprennent à témoigner de la vie des travailleuses du sexe à Tapachula, Meliza écrit, Jossye dessine. Forte de ses études secondaires, Meliza assure des présentations publiques lors des campagnes de sensibilisation. Les deux cousines qui avaient eu si peur d’aller à l’office de migration qu’elles en avaient perdu leurs chaussures en courant, savent aujourd’hui que les migrantes peuvent se défendre.