« Ma vie est ici, pour le moment »

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Photo issue du webdocumentaire Les voyageurs

Fatoumata D, Sénégalaise

J’ai 48 ans, et j’ai un problème aux jambes. J’ai des difficultés pour marcher en ce moment. Être malade en Turquie, c’est très difficile, car il faut payer l’hôpital, et parce qu’on est seuls, sans la famille. Ici, j’ai des frères sénégalais, des gens du pays, mais ce n’est pas la famille.

Ici, ça va. On peut avoir un titre de séjour, mais les autorités ne donnent pas le droit de travailler. Ça ne sert donc pas à grand-chose. Je suis venue ici car j’avais un commerce à Dakar, mais les fonds se sont épuisés. Le problème, c’est de faire crédit aux clients : les gens ne te paient jamais et les fonds s’épuisent. Le commerce appartenait à mon grand-père. Mon mari m’a déjà beaucoup aidé à le sauvegarder. Maintenant, je suis ici pour gagner suffisamment d’argent pour le sauver.
On m’avait dit que l’on vivait bien en Turquie, qu’il y avait beaucoup de travail, que l’on n’avait pas de problème avec la police. Si j’avais su ! Tu arrives ici, et l’on te confisque tes bagages à l’aéroport : il faut payer pour les récupérer. Tu travailles une semaine dans une fabrique de vêtements, et on te paie à peine 100 liras [environ 40 euros].

Mon mari est gendarme. Nous n’avons pas d’enfant. Il m’a dit qu’il allait venir me voir quand il aurait des vacances. Mon idée est de sauver cette boutique. J’ai une amie sénégalaise qui possède un terrain au pays, et qui est venue ici pour aider ses enfants à préparer leur avenir. Elle veut gagner de quoi se faire construire une maison sur le terrain. Elle travaille dans une fabrique de vêtements. Elle dit : « Je me cache pour aider mes enfants. » Son mari est dépensier, et il a d’autres enfants avec d’autres femmes. C’est donc les femmes qui doivent soutenir leurs enfants.
Avant de venir en Turquie, je suis restée en Arabie Saoudite pendant quatre ans. J’étais partie pour faire du commerce, mais comme je n’avais pas de papiers, j’ai travaillé comme employée domestique dans une famille. Je faisais la cuisine et une autre femme, indonésienne, faisait le ménage. Ça allait., mais je suis restée quatre ans – et quatre ans, c’est long !

Mon père, au début, ne voulait pas que je parte à l’étranger. Puis, face à ma décision, il m’a dit : « Il faut que tu saches qui tu es. » Je suis l’ainée d’une famille de dix enfants. J’ai un autre frère en Chine. Je lui ai servi de modèle.

Ma vie est ici pour le moment. Mon rêve ? Ce serait que mon mari fasse une mission à la CDAO, ce qui permettrait d’avoir de l’argent, et comme cela, je pourrais être commerçante, faire la navette entre la Turquie et le Sénégal, gagner un petit capital. Et pourquoi pas partir en Chine pour faire la navette avec le Sénégal ?

 

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